Dans mon précédent billet, j’ai évoqué l’existence de catholiques intégristes qui n’hésitent pas à animer des conférences et cérémonies religieuses pour le compte de groupes néofascistes, afin d’en faire des « soldats du Christ ».

Qui sont ces prêtres réactionnaires qui dirigent notamment une école à Lévis?

La Fraternité Sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) fut fondée en Suisse par Mgr Marcel Lefebvre, en 1970, lui qui rejetait avec hargne le concile Vatican II (1962-1965).

Fermée à la notion de progrès, la FSSPX a multiplié les appuis à des partis politiques d’extrême-droite (dont le Front national) au cours des dernières décennies. Dans une perspective «national-catholique», on y vénère d’anciens héros fascisants tels les Espagnols Primo de Rivera et le général Franco, le rexiste Léon Degrelle, le maréchal Pétain qui collabora avec les nazis, etc. Au Québec, c’est le duplessisme qui tient lieu d’idéal politique à reconquérir…

En Europe, leur actuel leader spirituel est Mgr Bernard Fellay. Tout aussi radical que ses prédécesseurs, il  cibla, en 2013, qui seraient leurs ennemis à abattre:
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Les «ennemis de l’Église» sont «les Juifs, les francs-maçons, les modernistes!».

Ajoutons que les lefebvristes font un usage sélectif de la devise «aime ton prochain». Lors d’un passage à Sherbrooke en 1989, leur évêque intégriste Richard Williamson avait soutenu que les Juifs étaient des «ennemis du Christ» et que la Shoah était une fabulation des sionistes. Il répéta la même chose à la télévision suédoise vingt ans plus tard.

Leur organisation au Québec

Pour le Canada, le responsable de la FSSPX est l’abbé Daniel Couture, celui-là même qui avait donné des conférences au Saguenay et à Québec en août 2015, dans l’objectif de pourfendre le féminisme et promouvoir le retour des femmes à la maison… De jeunes néonazis – qui fondèrent peu après Atalante Québec – étaient venus lui prêter main-forte en traversant une contre-manifestation. Ce geste anodin déstabilisa réellement les manifestants.es qui ont hésité à se regrouper lors des événements suivants:

zz Atalante

Selon l’abbé Couture, il y aurait de 600 à 700 fidèles au Canada. En outre, leur site officiel dénombre également trois écoles canadiennes qui leur seraient rattachées, une en Ontario, une en Alberta, l’autre à Lévis.

La Fraternité Saint-Pie-X semble bien implantée au Saguenay et à Québec, où elle prodigue nombre de messes et conférences. Elle peut aussi compter sur une publication bimestrielle, Le Carillon, imprimée à Saint-Césaire en Montérégie, où se trouve leur siège social canadien.

zzz Couture

Afin de «rechristianiser» l’Occident, la FSSPX reçoit l’apport de dynamiques dévots tels Kenny Piché et Étienne Dumas, fondateurs du groupe Tradition Québec.

Cette organisation identitaire et patriarcale fut formée à l’orée de 2014. Elle se veut une coalition de jeunes «pères de famille» catholiques pratiquants du Saguenay et de la région de Québec, ayant pour objectif la défense de nos origines chrétiennes. Comme le décrit le président fondateur Étienne Dumas:

«Nous ne nous battons pas pour des bâtiments ou du matériel, mais pour Dieu et notre patrie. Notre identité est malade depuis 50 ans du fait qu’on occulte et qu’on renie ce que nous sommes» (28 février).

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Les deux jeunes fondateurs de Tradition Québec, proposant des pamphlets anti-féministes.

Lorsqu’ils parlent d’entrer en résistance, cela peut être compris en un sens assez fort : leur proximité avec des formations d’extrême-droite comme Atalante Québec ou la Fédération des Québécois de Souche est inquiétante. Le 1er mai 2016, notamment, l’un de leurs prêtres donna carrément une messe au groupe néonazi Atalante sur les plaines d’Abraham, en l’honneur de Jeanne d’Arc…

Ce regroupement – qui condamne l’homosexualité et la contraception comme «péchés» – pose parfois des actions directes.

Outre l’affaire du crucifix en février dernier – «On est allés nous-mêmes le réinstaller» – il y eut un événement similaire à Chicoutimi en décembre 2015 : une crèche fut installée à la Place du citoyen, en réaction à l’interdiction de réciter la prière à l’hôtel de ville. Le porte-parole Kenny Piché expliqua leur geste par cette bravade : «Le Mouvement laïque québécois tient peut-être les politiciens à la gorge, mais il ne tient pas les simples Québécois catholiques».

En septembre 2015, des adeptes de Tradition Québec avaient aussi posé une affiche, surplombée de leur drapeau, devant l’église Fatima de Jonquière pour protester contre la désertion des églises. L’affiche proclamait : «Je me souviens que le Québec est catholique et doit le rester»…

zzjeme souviens

Enfin, un autre chaud partisan de Tradition Québec est l’historien Jean-Claude Dupuis, qui plaide de son côté pour une réhabilitation de la figure de Maurice Duplessis.

Duplessis fut, selon lui, «le plus grand premier ministre de l’histoire du Québec» (Le Carillon, 2017). Ses ouvrages de tendance réactionnaire sont publiés par la Fondation littéraire Fleur de Lys, à Lévis.

J.-C. Dupuis donna la première conférence officielle de Tradition Québec le 15 mai 2015, dénigrant la Révolution tranquille. Il multiplia ses contributions par la suite et fut également invité pour quelques entrevues par la Fédération des Québécois de Souche (FQS).

On peut constater, en dernière analyse, que la FQS joue un rôle de premier plan par les tribunes qu’elle offre à ces intégristes de Tradition Québec, les mettant parfois en liaison avec les boneheads d’Atalante. La FQS opère ce même type de service avec d’autres idéologues radicaux, venus de partout en Occident, pour les faire connaître à nos activistes locaux.

xx FQS

Ces différentes organisations finiront-elles par s’allier à des groupes xénophobes comme La Meute?

Cette dernière serait trop progressiste au goût du porte-parole d’Atalante: « Nous croyons que la démocratie est le pire régime que le monde ait jamais connu (…). Notre mouvement est révolutionnaire, nous nous battons pour quelque chose » (16 août).

Ces organisations se battent pour quelle cause alors, le fascisme?

Une réflexion sur “Ces religieux qui appuient l’extrême-droite québécoise (2e partie)

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