Léo Laberge de La Prairie, né en 1936, est la figure tutélaire de « Tradition Québec », un mouvement de jeunes religieux ultraconservateurs se battant pour le retour de la messe en latin, les crèches publiques et le maintien du crucifix sur les murs de nos institutions.

Ils sont aussi des adorateurs d’Adrien Arcand, le « Führer canadien » des années 30’-40’:

Il semble que dans sa jeunesse, Léo Laberge ait participé au dernier coup d’éclat d’Adrien Arcand, en 1960.
D’après l’historien David Rajotte : « La dernière grande action publique du Parti de l’Unité nationale avant la mort d’Arcand a concerné La Clé du mystère. En mai 1967, les journaux ont rapporté que des exemplaires du pamphlet avaient été transmis en grande quantité à plusieurs députés ». Notons que la Clé du mystère était un pamphlet antisémite de 64 pages qui accusait les Juifs de tous les crimes de l’humanité.

« Environ 100 000 brochures avaient été imprimées en 1966. Elles avaient toutes été envoyées d’une boîte postales au nom de l’Alerte de l’Occident. Les Gendarmes ont simplement ont simplement cherché à qui appartenaient cet éditeur et la case postale. La maison d’édition était aux noms de Wilfrid Beauregard et de Léo Laberge (…). La police a pu ainsi confirmer que le PUNC (parti d’Arcand) était derrière la campagne d’envoi » (BHP, janv. 2018).
Selon la biographie d’Adrien Arcand par Jean Côté – qui l’admire – il y aurait bel et bien un Laberge parmi ses héritiers idéologiques : « Dans tous ses écrits philosophiques le nom de Dieu, tel un leitmotiv revenait constamment sur ses lèvres. Ses derniers disciples, toujours vivants, les Lemieux, les Lanctôt, les Laberge, les Bleau et quelques autres témoignent que toute la pensée politique de leur chef était nourrie par ses études dans des établissements catholiques ».

Notre Léo Laberge (photo ci-dessous avec moustache blanche) est toujours à la tête d’une maison d’édition – Héritage-Québec – enregistrée à La Prairie. Il y publie principalement des ouvrages sur ses origines familiales. Une autre de ses publications dresse le portrait historique du Comptoir Emmaüs, à Québec, un organisme de charité dont Léo Laberge (de La Prairie) fut jusqu’à tout récemment le vice-président.

Passons maintenant au milieu des années 70’, lors desquelles M. Laberge se démarqua par un autre coup d’éclat. Il s’impliqua dans un groupe d’activistes intitulé « Comité pour la défense de la messe traditionnelle » qui peut être perçu comme l’ancêtre de Tradition Québec.
Dans la revue Le Carillon – organe de propagande de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) – Léo Laberge relate cette belle époque où son groupuscule était formé d’une « poignée de laïcs qui s’occupait de l’organisation matérielle, des communications téléphoniques et médiatiques et organisait des conférences grand public ».
Le groupuscule de Laberge avait donc invité Mgr Marcel Lefebvre en personne au Québec, qui venait de fonder la FSSPX en 1970. Tout comme Laberge, cette secte milite pour « maintenir les droits du vénérable rite catholique » contre le méchant Concile Vatican II, qui modernisait l’Église.

Lors de son passage en novembre 1975, Mgr Marcel Lefebvre donna son appui au curé de la paroisse Sainte-Yvette à Montréal, qui souhaitait s’accrocher aux anciens rites. Après son départ, le groupuscule de Laberge occupa l’église jusqu’en décembre, par esprit de résistance. Leurs actions leur ont valu une arrestation : « Léo Laberge (et cie) se voyaient accusés « d’occupation illégale de domicile et de temple » » (Le Carillon, oct. 2015).
Dans ses entrevues, M. Laberge soutient qu’une « poignée de braves » peut ainsi changer le cours des choses : « Fortement médiatisées, les événements de Sainte-Yvette eurent une répercussion mondiale » (Ibid.). Il estime toujours que l’Église traditionnelle peut être le seul remède à la décadente modernité : « Il n’y aura pas de réaction nationale sans l’Église revenue de son modernisme et de sa démocratie libérale » (Le Carillon, janv.-fév. 2016).
Malgré son attachement à la messe traditionnelle, M. Laberge est un « laïc », il n’est pas prêtre. Quelle a pu être sa profession? Selon un compte LinkedIn, Léo Laberge de La Prairie est un retraité de la Sûreté du Québec (SQ). Le logo de la SQ apparaît d’ailleurs en évidence. Y a-t-il d’autres Léo Laberge à La Prairie?
À compter de 2011, on voit Laberge se présenter aux côtés de Gilles Rhéaume, dans un regroupement appelé l’« Assemblée des patriotes de l’Amérique française ». Rhéaume qui fut président de la Société Saint-Jean-Baptiste (SSJB) de 1981 à 1985, en est le secrétaire, tandis que Léo Laberge (toujours de La Prairie), en est le vice-président. Ce regroupement était d’ailleurs inscrit à la Maison Ludger-Duvernay – SSJB de Montréal.
Lors du lancement, Léo Laberge prenait la parole au micro (à 31m40s de la vidéo officielle) :
Sur la chaîne Youtube de la Fédération des Québecois de souche (FQS, groupe d’extrême-droite suprémaciste), on peut y écouter la conférence du néonazi Sylvain Marcoux (avril 2013), à Drummondville. La présentation de la conférence est faite par Kenny « Goglu » Piché, nul autre que le jeune porte-parole de Tradition Québec. Quant à Sylvain Marcoux, il est également membre de Tradition Québec et aime bien se recueillir sur la tombe d’Adrien Arcand de temps à autre… Léo Laberge appararaît à la première minute de la vidéo :

En novembre 2015, Laberge se trouve à l’intronisation religieuse du « Mouvement Tradition Québec » (photos ci-dessous) avec le jeune président Étienne Dumas et Mgr Tissier de Mallerais, l’un des rares évêques de la FSSPX à avoir été consacré par Mgr Marcel Lefebvre. Mgr Tissier de Mallerais était présent pour « bénir » Tradition Québec par des rituels stricts. Il ne fait aucun doute que Laberge souhaitait que tout se fasse selon les règles de l’art…
Rappelons que des prêtres de l’école Sainte-Famille à Lévis, dirigée par la FSSPX, ont participé à des événements de Tradition Québec et ont animé une sainte commémoration en l’honneur de Jeanne d’Arc sur les Plaines d’Abraham, pour le compte d’Atalante Québec (boneheads néonazis) :
Les rassemblements religieux de Tradition Québec ont parfois retenu l’attention de nationalistes québécois plus connus, tel l’ex-ministre Richard Le Hir :

Conclusion
En conclusion, le portrait global de Léo Laberge montre bien qu’il a toujours été un ardent militant de la FSSPX au Québec, branche du mouvement traditionaliste le plus réactionnaire.
Dans ses écrits récents, il fait toujours l’apologie du nazi Arcand qu’il surnomme affectueusement « l’érudit Adrien Arcand ». Il admire également Duplessis, les « groulxistes », Jules-Paul Tardivel, puis les fascistes des Jeune Canada, de La Nation (Paul Bouchard) et des disciples d’Arcand comme Fortunat Bleau.
Dans son brûlot « Pauvre Québec! » (janv.-fév. 2016), Laberge pourfend ce qu’il nomme le « génocide national » : « divorce, avortements massifs, stérilisation, suicide, mariage gay, euthanasie, déchristianisation accélérée ». Tout cela aurait pour origine la « franc-maçonnerie », « une kyrielle de professeurs athées, freudiens et marxistes », le « diable » et « l’anarchie »…
Le point de vue qu’il tient sur la Révolution tranquille, René Lévesque et Bourgault est celui d’un homme d’extrême-droite :
Léo Laberge se sert donc de Tradition Québec pour laisser derrière lui des héritiers d’Arcand, qui poursuivront son œuvre.

Ces jeunes hommes sont maintenant aux commandes d’une nouvelle maison d’édition, les « Éditions de la Vérité », qui rééditera des classiques du fascisme québécois, tel « L’infiltration gauchiste au Canada français » de Robert Rumilly (réédité en 2018).
Le jeune Étienne Dumas était sur les tribunes d’extrême-droite pour promouvoir cette réédition de Rumilly :
Merci M. Laberge pour ce legs dont on aurait pu se passer…