Samedi matin, le candidat à l’investiture dans Bertrand, Jean Bottari, décide soudain de délaisser sa campagne électorale, alors qu’elle était pourtant annoncée depuis aussi loin que le 16 avril dernier :
Pourquoi ce revirement?
Les raisons de son départ restent obscures : « J’aurais aimé qu’on me guide. Qu’on m’explique la procédure ». Du même souffle, il explique avoir demandé le soutien officiel du chef Jean-François Lisée, ce que ce dernier refusa. Il faut dire que les affaire « Muguette Paillé » et Michelle Blanc en avait ébranlé plus d’un.
Bottari savait être dans l’eau chaude
Il y a quelques semaines, après avoir publié des dossiers sur les candidates péquistes Muguette Paillé et Michelle Blanc, le candidat Jean Bottari m’avait contacté (par bravade, il se trouvait drôle) pour me dire que j’aurai sans doute beaucoup de matériel controversé sur lui, autant sur Facebook que sur Twitter.
J’ai donc relevé le défi de M. Bottari en découvrant qu’il a déjà été membre en ligne de La Meute, interagissant en toute connaissance de cause sur leur groupe secret. Il multipliera aussi les commentaires et « likes » hostiles à l’endroit de l’islam ou de l’immigration, et ce, sur une période d’au moins trois ans.
Les implications douteuses de Jean Bottari sur les réseaux sociaux furent d’ailleurs partiellement exposées au grand jour le 25 mai dernier sur On Jase, puis deux semaines plus tard dans The Gazette (5 juin). Parions que ces deux révélations ont dû passablement freiner ses ambitions politiques.

La sortie hâtive de M. Bottari aura au moins le mérite d’alléger le Parti québécois d’une autre patate chaude, étant donné les nombreux commentaires polémiques qui auraient pu rattraper leur candidat en cours de campagne. J’en propose un aperçu.
De La Meute au Parti québécois?
Un premier point à noter c’est que M. Bottari fut membre du groupe secret de La Meute – groupe d’extrême-droite anti-islam –, en 2015 et 2016. Ce dernier ne pourrait pas plaider l’ignorance : il participa activement à certaines conversations. J’en donnerai deux exemples.

Le 30 septembre 2015, un « loup » du nom d’Augustin Réhel proposa la création d’un parti politique qui aurait pour dessein spécifique la lutte à l’islamisme. Bottari accueillit chaleureusement la proposition : « Allez hop! Comme disait l’autre… Je suis prêt !!! » :
Quatre mois plus tard, notre futur candidat péquiste était toujours dans La Meute, appuyant le statut d’un Meuton clamant être plus fier que jamais de « faire partie de La Meute » pour lutter contre l’islam pro-charia, car « il en va de notre survie à tous (…) dans 10 ans il sera trop tard »… dix ans?
Bon, voilà pour La Meute, une recherche approfondie démontre qu’il se retrouvera aussi membre, en 2017, d’un autre groupe fermé, « Les Justiciers du peuple », qui s’avère un groupe xénophobe dérivé de La Meute, qui a déjà organisé des manifs anti-immigration à Québec.
Bottari se liera aussi virtuellement d’amitié avec des personnages peu recommandables, tels Josée Rivard et Véronique Bohémier, bien connues au sein de la droitosphère. Mme Rivard fait d’ailleurs toujours partie de ses « Mentions J’aime » sur Facebook (petit échantillon) :
Concluons cette section par quelques commentaires scabreux et hurluberlus de Mme Bohémier, « liké » par Bottari sur les médias sociaux.
On y « apprend » par exemple que la fille des Clinton serait mariée au neveu du seul et unique George Soros! Qu’on qualifie de « traître diabolique ». L’image a beau contenir le terme « illuminati », elle fut quand même « likée » par Bottari (4 janv. 2018):
D’autres déclarations de Mme Bohémier sont moins comiques. Par exemple ici, où elle taxe « Allah » de « pédophile qui ne vivait que pour combattre et tuer ». Notre champion du PQ était d’accord :
Puis elle annonce qu’elle pense partir dans le Sud, car là au moins ils « refusent les musulmans »:
Ses opinions sur les demandeurs d’asile ne sont guère plus tendres. Bohémier les surnomme « faux réfugiés », relayant des nouvelles les faisant passer en partie pour des pédophiles et des « criminels » :
Bottari avait donc « liké » chacun de ces Tweets. Passons maintenant à ses différentes prises de position sur Facebook.
Une « croisade prioritaire » pour Bottari
Si la question des soins de santé est le principal cheval de bataille de Bottari, il érige son hostilité au « voile » au rang de « priorité ». À l’occasion de la nouvelle révélant qu’une jeune femme musulmane souhaitait devenir policière (avril 2018), l’ex-candidat péquiste laisse tomber cette déclaration :
Il s’inquiète d’ailleurs de l’effet des voiles en CPE:
Pour Bottari, le hijab doit être combattu, car il y voit un symbole sexiste de « soumission ». Il partage même un truc laissant entendre qu’on aurait là du « terrorisme passif » :
Quant à sa vision du vivre-ensemble, il semble plaider pour l’assimilationnisme : « À Rome, fais comme les Romains » :
Pour poursuivre sur son bon rapport à l’islam, il appuie ces commentaires tambourinant qu’ « Allah c’est le diable » et que Mahomet était un « pseudo-prophète psychopathe pédophile et misogyne, amateur de bestialité », quelle classe…
Il soutient aussi un paquet d’amis.es martelant que nous sommes « enhavis » de tous bords tous côtés, la fin approche :
Ça sort et ça rentre, c’est une « évasion » !
Il faut maintenant cette superbe civilisation qui est la nôtre, car contrairement aux Témoins de Jéhovah et aux musulmans, « nous avons évolué » :

Son point de vue sur les politiciens.nes
Pour les islamophobes, l’une des premières critiques adressées aux politiciens.nes sera de les accuser de compromission avec les satanés « islamisssses ». Comme nous pourrons le constater, Bottari n’échappe pas à cette logique. Voyons par hasard Couillard, main dans la main avec les « Allah Akbar», pis les « votes ethniques » :
Couillard serait rien de moins qu’au « service de la communauté musulmane radicale » et il « fréquente » directement les « islamistes » :
Puis on badine sur le fait que le premier ministre aurait lui-même un petit quelque chose de « musulman » :
Pour ce qui est de la scène internationale, l’inénarrable Véronique Bohémier nous suggère que l’ONU collaborerait au « Grand Remplacement » de toute la civilisation occidentale :
Du côté de Québec solidaire, ce serait aussi un parti islamisé :
Tandis que Justin Trudeau, tout le monde sait ça, est un « fou d’Allah », il visite même des mosquées « oulalalah » :
On va donc toutes et tous finir avec « des tapis et un voile » :
Conclusion
Pourquoi le Parti québécois attire-t-il autant de gens angoissés par l’islam et l’immigration? L’épisode de la Charte des valeurs (2013-2014) y est sûrement pour quelque chose.
Nombre de sorties identitaires de Jean-François Lisée ont peut-être également contribué à cet élan. Rappelons par exemple qu’il s’était démarqué de son rival Alexandre Cloutier, durant la course à la chefferie, par des positions fermes sur les questions de « laïcité ».

Le départ précipité de Bottari, candidat à l’investiture dans Bertrand, est sans doute une bonne nouvelle pour le PQ, qui pourra souffler un peu. Comment éviter ce genre d’imbroglios à l’avenir? Probablement en changeant de discours, en misant sur un Québec ouvert et inclusif, tout simplement.