Dans ce billet, je souhaite présenter de manière concise qui sont les leaders du mouvement anti-masques au Québec.
Nous verrons qu’une bonne part de l’extrême-droite xénophobe s’est aujourd’hui recyclée dans la lutte contre le « confinement », lui permettant ainsi de rejoindre un plus large public et grossir son influence.
Ces gens fantasmaient déjà de renverser le pouvoir pour instaurer une sorte de régime fascisant inspiré de Trump. La pandémie leur a permis de toujours viser cet objectif, mais en instrumentalisant une nouvelle « cause ».

Stéphane Blais et son parti « Citoyens au pouvoir »
Le gourou Stéphane Blais occupe une place centrale sur l’échiquier conspirationniste en ce qu’il porte deux chapeaux à la fois : celui de président de la Fondation qui défie le gouvernement du Québec, et celui de chef d’un parti politique provincial.
Dans les médias, on néglige de souligner à quel point le rôle de Stéphane Blais comme chef de « Citoyens au pouvoir » (CAP) a été capital : son bras droit à CAP est Daniel Pilon, des militants et ex candidats sont Mario Roy, Alexis Cossette-Trudel, Jean-François Dubois, Daniel St-Hilaire, Ken Pereira, André Pitre… bref beaucoup des leaders actuels du mouvement anti-masques.





Blais utilise ce réseau de contacts pour assurer sa mainmise sur la « Fondation » qui a récolté 500 000$ de dons dès le premier mois, afin de poursuivre en justice les mesures sanitaires (les complotistes croient que les recommandations de la Santé publique participent à un vaste complot pour mettre sur pied un régime totalitaire…).
Pour situer Stéphane Blais, il s’est tout d’abord fait connaître lors d’une course à la mairie de Lévis en 2013, pour laquelle il n’avait pas acquitté sa dette électorale. Sa carrière politique municipale avait ainsi été interrompue.

L’homme d’affaires – comptable agréé spécialisé en fusions & acquisitions – s’est rapproché de l’extrême-droite à l’été 2017, en participant à un congrès du Mouvement républicain du Québec, lié au groupe La Meute : on peut le voir ici faire un discours dans une écurie de St-Lazare (ils fuyaient les antifascistes de Montréal), suivi du chef de La Meute Sylvain « Maikan » Brouillette :




C’est durant ce colloque que Blais a fait la connaissance de représentants de Citoyens au pouvoir, parti qui était dirigé par trois sympathisants de La Meute : Bernard « Rambo » Gauthier, Yvon Simard et Mario Roy (pour un portrait détaillé, voir ici).

Peu après, Rambo a quitté et c’est Stéphane Blais lui-même qui a pris les rênes du parti. Et bien que cette formation politique reçoive peu de votes, Blais a pu se bâtir une garde rapprochée (les Daniel Pilon, St-Hilaire, Cossette-Trudel, J-F Dubois, etc.).
Notons que pendant la pandémie, Stéphane Blais semble se payer un salaire supplémentaire grâce au parti :

Qui plus est, ce même parti récoltait directement des « dons » qui devaient aller à la Fondation, comme l’a révélé l’ex co-administratrice Caroline Mailloux :


Stéphane Blais et la « Fondation pour la défense des droits et libertés du peuple »
Au début de mai, Stéphane Blais a rassemblé un collectif de complotistes anti-confinement pour poursuivre le gouvernement Legault.
Dès le 21 mai, une émission en primeur au studio d’André Pitre démarre une campagne de fonds qui récoltera des centaines de milliers de dollards$. Des figures connues comme Alexis Cossette-Trudel et Lucie Laurier confèrent une certaine « crédibilité » au mouvement.


Deux semaines plus tard, l’entreprise atteint son pic de popularité lorsque Me Guy Bertrand annonce qu’il représentera la Fondation dans la poursuite contre le gouvernement :

Toutes les personnes sur les photos ci-dessus, sauf Blais, ont quitté le navire de la Fondation, confirmant que Stéphane Blais est le seul et unique maître à bord.
Au poste de vice-présidents, il a nommé son pote Daniel St-Hilaire et une certaine Mel Goyer. St-Hilaire, qui se présentait pour CAP en 2018, flirte avec l’extrême-droite:

Quant à Mel Goyer, sa fonction principale est de gérer leur page Facebook, qui idolâtre la théorie d’extrême-droite « Q-Anon » :


Alexis Cossette-Trudel, grand pontife de Q-Anon
Comme on l’a vu, Cossette-Trudel était déjà un proche de Stéphane Blais via le parti Citoyens au pouvoir.
Entre-temps, la chaîne YouTube de cet adepte de Q-Anon – Radio-Québec – dépasse les 100 000 abonnés.es. Il y a un véritable culte phénoménal autour de cet illuminé, qui plaide que le monde est gouverné par une élite pédophile pratiquant des rituels sataniques et cannibales :



Loin d’être un simple weirdo dans son coin, Cossette-Trudel co-organise des manifestations attirant des centaines de marcheurs, et est un habile orateur :

Devant le quartier général de la SQ, il a notamment déclaré : « C’est une fraude statistique » (les morts de la Covid n’existeraient pas), Arruda « efface les traces l’ostie! », « Ils mentent pour contrôler la population, des salopards ou bien crapules, assassins aussi », « on ne le dira pas en public, on sait c’est quoi, c’est à la police de faire ce travail-là » (c’est-à-dire les renverser en tant que traîtres et criminels).

Toujours en hurlant au micro, Cossette-Trudel ajoute : « Ils nous ont incarcéré pendant 2 mois, pendant qu’ils faisaient le ménage dans les CHSLD », « les gouvernements sont drogués au pouvoir », « pour nous faire passer dans un système politique totalitaire, un coup d’État », « Y a-t-il encore des hommes d’honneur dans la police ?? ».
(Pour un portrait plus complet de ce gourou, cliquez ici)
Notons que l’autre grand prêtre de Q-Anon dans la francophonie, « Dan Ad Lumen », est également un Québécois: Daniel Latulippe. Il est le principal administrateur de « 17FR » (anciennement nommé « Q ANON Français »), qui compte près de 30 000 abonnés.es :

Stu Pitt et Ken Pereira : Qltistes dissidents
André Pitre (alias Stu Pitt), a prêté son propre studio et a participé au lancement de la Fondation. Il fut militant de La Meute pendant un certain temps.



Pitre et Ken Pereira sont eux aussi des adeptes de Q-Anon, quoique Ken Pereira semble penser que même « Q » fait partie du complot, ce qui l’a amené à s’opposer vivement au gourou Cossette-Trudel. Pereira – complotiste notoire qui croit que les nazis étaient aidés par les extra-terrestres sur la Lune – est désormais honni par Cossette-Trudel :


L’Artiss Charland, Mario Roy et les ex meutons
Un autre important leader qui électrise les foules et co-organise les manifs, est Steeve « L’Artiss » Charland.

Il est pourtant important de rappeler qu’il s’agit de l’ex numéro 2 de La Meute, un groupe haineux. On peut le voir ici qui simulait d’égorger le chef Sylvain « Maikan » Brouillette, car plusieurs le soupçonnaient de vouloir prendre sa place :


Charland était par exemple derrière l’opération de vandalisme des bureaux électoraux aux dernières élections provinciales, nommée « Opération pattes de loup » :


L’Artiss Charland, sa conjointe Karol « La Louve » Tardif, et ses bodyguards William Johnson et Tonio Sergerie, sont tous d’anciens militants de La Meute maintenant fortement impliqués dans le mouvement anti-masques :

Un autre leader influent, Mario Roy, qui veut fonder une nouvelle « Union nationale » et faire arrêter Legault et Arruda, porte toujours fièrement ses habits de Storm Alliance (groupe haineux) :



Les complotistes d’ « Appel à la liberté » et de « ThéoVox »
D’autres adeptes de Q-Anon occupent le devant de la scène, tel Frédéric Pitre, administrateur du groupe « Appel à la liberté ». Ce groupe Facebook compte 9000 membres, et forme ainsi un bon bassin de militants.es :


« Appel à la liberté » portait au départ le nom de « Manif anti-confinement », et avait été cofondé par Jean-Marc « Rétro » Lacombe et Frédéric Pitre.
Rétro Lacombe est un ex du groupe d’extrême-droite Storm Alliance. Il est maintenant un fier à bras des Gardiens du Québec (force de sécurité de la « Vague Bleue ») :


Quant à Frédéric Pitre, c’est un disciple de Q-Anon, ces complotistes qui croient que le monde est gouverné par une élite pédo-sataniste (excepté Trump, ce valeureux chevalier de la droiture morale).
Au plan de la propagande, le comédien et ex « éco-terroriste » Joël Hamel-Hogue a produit un documentaire pour le compte d’Appel à la liberté. Plus de 10 000 personnes ont partagé la bande-annonce :

Joël Hamel-Hogue co-organise des événements et prend la parole:


Soulignons également l’infiltration d’une plateforme chrétienne intégriste du nom de ThéoVox :

Leur meneur est Jean-François Denis, un autre illuminé anti-progressiste qui panique en raison de la diversité sexuelle. Leur peur du changement les amène également à rejeter le port du masque, tout en s’introduisant dans les manifs ou en faisant des entrevues studio pour recruter des complotistes :

Le pire c’est que même les militants qui étaient prêts à mourir pour la « laïcité », comme Steeve Charland, sont maintenant chummies avec ThéoVox:



Conclusion : Le tableau présenté n’est pas exhaustif, mais peut être utile pour situer les différents.es acteurs et actrices à travers la fachosphère.
Comme on peut le constater, la plupart de ces personnages grouillaient déjà dans l’extrême-droite avant la pandémie. Se sont ajoutés à cela de nouveaux sectateurs de Q-Anon qui rêvent d’un renversement de pouvoir à Ottawa et à Québec, afin de favoriser l’émergence d’un populiste fascisant à la Donald Trump…